PAS UNE FIN POUR LE TERMINAL

Pendant le confinement et cette nouvelle période que nous vivons désormais, Pulse Addict est allé à la rencontre de différents acteurs de la musique électronique. Qu’ils soient musiciens, bookeurs, exploitants ou directeurs artistique, nous avons échangé autour d’une thématique : la fête de demain.

Deuxième portait de la série avec Philippe FRANCESCONI, gérant du Club lyonnais le Terminal depuis trois ans. Il nous partage ses inquiétudes et sa vision de la teuf du futur… Une crise qui n’est pas sans incidence pour son club qui pourtant, affichait un bilan rentable pour la première fois depuis son arrivée.

Pulse Addict : « QUELLE ÉTAIT VOTRE DERNIÈRE SOIRÉE ? »

Philippe Francesconi : « Le début du confinement s’est effectué le 12 ou 13 Mars. On n’a pas voulu prendre de risque et on a fermé le samedi avant l’annonce. On ne voulait pas passer pour des shlags. Il n’y a pas eu une seule activité depuis. On a eu quelques avancés par rapport au Nuit Sonore. On a pu s’organiser assez rapidement quand ils ont annulé. Ça nous a permis de souffler un peu. On a toujours le loyer à payer, la TVA, etc. Il y a eu beaucoup d’annonces pendant le confinement mais pas grand chose en terme d’aide. Quoi que je fasse, je ne vois pas comment je peux monétiser quoi que ce soit. Ils ont exonérés les charges sociales mais ce n’est pas assez malheureusement. Faut quand même avancer des salaires, c’est compliqué. Comment on va ouvrir ? Les petits commerces ont réouvert mais nous c’est le flou total. »

Pulse Addict : « QUELLE EST VOTRE STRATÉGIE POUR L’OUVERTURE ? »

Philippe Francesconi : « La seule solution que j’ai actuellement c’est de faire un prêt à la banque pour sortir la tête de l’eau. On a quasiment fini de payer le prêt initial. On devrait pouvoir s’en sortir. La deuxième chose c’est comment tu veux mettre en place une distanciation sociale ? Est ce qu’on va être obligé de porter un masque, est ce qu’on sera tenu responsable en cas de Covid ? Qu’est ce qui va se passer pour des lieux comme les nôtres qui accueillent du public ? Soit on vie avec et on s’en fiche… Et puis même ! Si je baisse ma jauge de capacité, qui est de 100, par deux… je ne suis pas rentable. C’est très difficile de se projeter sans date. Ah et qu’est ce qu’on fait des surfaces ? Le contact des surfaces, tu dois tout le temps nettoyer comme on voit dans les écoles, les transports. Nous tu rajoutes en plus l’alcool. Tu dois picoler aussi. Comment tu fais ? Quand t’es alcoolisé tu ne vas pas du tout respecter les règles. Donc si jamais les gens font n’importe quoi, qui est responsable ? C’est toutes ces questions qui sont vitales auxquelles il faut répondre rapidement. Puis moi j’ai des appréhensions pour le public. Je pense que les gens sortiront mais bon, j’imagine un peu difficilement la teuf dans des clubs comme le mien alors je ne te parle même pas des gros clubs. J’ai eu une jauge proche d’un bar donc je pourrais peut être m’aligner sur quelque chose d’intéressant pour le club. On pourrait très bien changer nos heures mais c’est un parti pris d’être calquer sur des horaires de club. Puis nous on n’a pas de terrasse, c’est un spot fermé et c’est bas de plafond. Donc transformer le Terminal en bar c’est délicat. Pour ce qui est de l’ouverture, je me projete pour mi-juin mi-juillet. Ça peut être envisageable quand tu vois ce qu’il se passe en Allemagne. En terme de programmation, on a tout remis à plat. Tout ce qui est international c’est mort. Donc l’idée c’est peut être de s’ouvrir un peu aux assos du coin. Ça serait de jouer un peu plus la carte de la scène locale, pour qui ça a été compliqué aussi. L’idée c’est de proposer une programmation un peu solidaire tout l’été, de faire jouer le plus de gens possible, axer local. On a besoin de travailler le plus tôt possible. »

Pulse Addict : « QUELLE EST TON OPINION DE LA GESTION DU MINISTÈRE DE LA CULTURE ? »

Philippe Francesconi : « Je pense qu’on est un peu mis de côté. Le cinéma a eu une visibilité bien supérieure à la notre. Et tant mieux pour eux ! Ce que j’ai vu du président et ce qui il y a eu derrière est insuffisant. Notamment pour les gérants comme nous. Je pense qu’on n’est pas la priorité. Je trouve ça con qu’il y ait beaucoup d’énergie dépensé pour les écoles alors que ça ne change pas grand chose que les enfants aillent à l’école dans ces conditions et vu le temps de classe qu’il reste. Attention, je comprends tout à fait que les parents soient au bout ! Pour nous, on pourrait commencer à envisager des choses mais il faut qu’on discute avec les assos lyonnaise et qu’on s’organisent ensemble. »

Pulse Addict : « JUSTEMENT, COMMENT VOUS ORGANISEZ VOUS ENSEMBLE ? »

Philippe Francesconi : « On a un peu les mains liées pour l’instant. On peut anticiper un peu et se calquer sur ce que font les bars pour avoir des idées. On est tous dans l’attente. Les artistes vont vouloir jouer ! Il va falloir qu’on discute avec eux aussi. Je crois que de toute façon, on va tous adopter la même stratégie : à savoir jouer sur le local et ça sera à chacun de s’adapter. Nous de notre côté, il va falloir qu’on soit très réactif ! « 

 

                             Propos recueillis par FELIX MEUNIER

Crédit photo : Gcp Lyon